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Mission universitaire haïtienne à Taïwan

Une mission universitaire haïtienne de haut niveau a séjourné du lundi 08 au vendredi 12 août 2011 en République de Chine (Taïwan) aux fins de renforcer les échanges académiques et universitaires qui existent fort heureusement entre les deux pays. Au menu des multiples rencontres entre les autorités académiques des deux nations, il en a résulté des perspectives heureuses qui prendront la forme du resserrement des relations entre les universités taïwanaises et les universités haïtiennes.

Le professeur Jean-Vernet Henry, recteur de l’Université d’Etat d’Haïti (UEH) et l’ambassadeur Denis P. Régis, directeur général du Centre d’études diplomatiques et internationales (CEDI)
Le professeur Jean-Vernet Henry, recteur de l’Université d’Etat d’Haïti (UEH) et l’ambassadeur Denis P. Régis, directeur général du Centre d’études diplomatiques et internationales (CEDI)

1. Composition de la délégation

A l’invitation du gouvernement de la République de Chine (Taïwan), une délégation académique et universitaire haïtienne a laissé Port-au-Prince le samedi 06 août 2011 à destination de Taipei, la capitale de l’île de Formose. Composée de M. Jean-Vernet Henry, recteur de l’Université d’Etat d’Haïti, de l’ambassadeur Denis P. Régis, directeur général du Centre d’Etudes Diplomatiques et Internationales (CEDI) et professeur à la Faculté de droit et des Sciences Economiques de Port-au-Prince (FDSE), de M. Ude Nord, professeur à la Faculté des Sciences, et de Me. Renan Hédouville, professeur au CEDI et à la Faculté de droit, la délégation fut accueillie au petit jour du lundi 08 août à l’aéroport international Taoyuan de Taipei par M. Gregorio Kuo-Rey Tzeng de la direction de l’Amérique latine et de la Caraïbe du ministère taiwanais des Affaires étrangères, et par M. Mario Chouloute, Chargé d’Affaires d’Haïti à la représention diplomatique haïtienne à Taiwan. Conduite à l’hôtel Ambassador de Taipei, la délégation eut droit à quelques heures de repos en vue de se remettre de ce long voyage de plus de 22 heures et du décalage horaire consécutif au fuseau horaire distinct entre l’Asie et l’Amérique.

2. Les premières visites

2.1. Déjeuner au Grand Hôtel de Taipei

Le même lundi à midi, la délégation fut conviée à déjeuner par le Chargé d’Affaires d’Haïti, Monsieur Mario Chouloute, au Grand Hôtel de Taipei, un somptueux monument que les Taïwanais considèrent comme un pan du patrimoine national de leur pays. Le Grand Hôtel se distingue dans le paysage de la ville avec sa couleur rouge vermillon et son toit incurvé qui le fait ressembler à un immense temple chinois. Cet hôtel de classe qui offre une vue splendide de Taipei accueille en règle générale les officiels et les dignitaires importants en visite à Taïwan. Il fut longtemps dirigé par l’épouse de l’ancien président Tchang Kai-Chek.

Au déjeuner, la délégation fut rejointe par le diplomate Roger Tseng qui fut en poste à l’Ambassade de Taïwan en Haïti pendant quatre ans. Roger Tseng qui travaille à la direction de l’Amérique latine et de la Caraïbe du ministère taïwanais des Affaires Etrangères est un fin connaisseur des réalités haïtiennes qu’il suit et analyse pour le compte de son pays avec une acuité et une passion extraordinaires. Il déplore avoir perdu, lors du séisme du 12 janvier 2010 en Haïti des amis remarquables dont il garde un souvenir impérissable.

2.2. Le Mémorial Tchang Kai-Chek

A l’issue du déjeuner qui fut un véritable régal gastronomique dans un lieu mythique, la délégation fut invitée à visiter le Mémorial Tchang Kai-Chek, monument érigé en la mémoire de l’ancien chef d’Etat disparu en 1975. Débuté le 31 octobre 1976, au 90ème jour anniversaire de naissance du président défunt, le mémorial est inauguré quatre ans plus tard, soit le 5 avril 1980. Il s’agit d’un bâtiment octogonal de marbre, haut de 76m qui surplombe un magnifique jardin de 25 hectares. Oeuvre appelée à défier le temps, elle demeure un témoignage du culte que vouent les Taïwanais à celui qui représente un symbole de leur fierté nationale.

2.3. Le Musée National du Palais

Au pas de charge, la délégation visita le Musée National du Palais, colossale construction où sont conservés avec un soin méticuleux tous les trésors de l’histoire légendaire de ce pays, rempli à longueur de journée de touristes, de curieux et de délégations venus du monde entier. Le Musée abrite plus de 666.000 pièces d’art chinois dont des calligraphies, des peintures chinoises, des ouvrages anciens, des archives de la dynastie Qing, des bronzes, des jades, des céramiques et des objets divers de collection datant de l’âge de la pierre, de la cour mandchoue, et des quatre dernières dynasties (Song, Yuan, Ming et Qing). Par la dimension, l’ampleur et la diversité de ses collections, le Musée National du Palais est considéré comme l’une des plus grandes institutions muséales du monde, à l’instar du Louvre, du British Museum et du Metropolitan Museum of Art de New York.

2.4. L’Office d’information du gouvernement taïwanais (le Yuan Exécutif)

Dans l’après-midi du 06 août ont débuté les rencontres protocolaires et formelles de la délégation qui fut reçue par deux officiels du gouvernement, Messieurs Albert Tsung-Chieh Liu et Franck Yu-Hsi Hsu, respectivement directeurs de l’Office d’Information du gouvernement, l’équivalent du ministère de la Communication en Haïti. Suite aux échanges d’amabilité et de courtoisie, la délégation eut droit à un court métrage retraçant l’histoire et le développement de cet Etat d’Asie de l’Est de 36.000 km² (9000 km² de plus qu’Haïti) avec une population de 23 millions d’habitants. Membre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), observateur auprès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), observateur ou membre associé auprès d’une vingtaine d’organisations intergouvernementales et structures affiliées, telles que l’OCDE, la BID ou encore la BERD et l’APEC, Taïwan a vu se développer et s’étendre des centaines d’ONG qui prennent part aux activités de plus de 2.000 autres ONG à travers le monde.

Le « miracle économique taïwanais » qui eut lieu simultanément avec le développement de la Corée du Sud, de Hong Kong et de Singapour, a pu faire parler à propos de ces quatre pays des « dragons asiatiques ». Taïwan est effectivement un pays développé à revenu élevé. Le produit national brut est de 14.459 billions de dollars taïwanais, ce qui équivaut à un PNB par habitant de plus de U.S. $ 21.000.00. le PIB total s’élève à près de U.S. $ 500 millions faisant de Taïwan la 24ème puissance économique du monde. En parité de pouvoir d’achat, Taïwan est la 19è puissance économique du monde et son PIB par habitant est équivalent à celui de l’Union Européenne. Selon le FMI, il s’est établi à près de U.S. $ 35.000.00, surpassant ainsi celui de la Finlande, de la France et du Japon.

2.5. La Tour Taipei 101

La délégation en fin d’après-midi se rendit à la Tour Taipei 101, une des principales attractions touristiques de l’île. Inauguré en 2005, ce gratte-ciel de 508 mètres était jusque-là la plus haute tour du monde avant d’être déclassé par le Willis Tower, à Chicago (527 mètres) et le Burj Khalifa, à Dubai, aux Emirats Arabes Unis (828 mètres). Ce dernier sera sans doute surclassé dans quelques années par le Kingdown Tower (entre 1.000 à 1.600 mètres) à Djeddah, en Arabie Saoudite.

La Tour Taipei 101 est une véritable prouesse technique avec ses 101 étages desservis par 67 ascenseurs qui permettent d’atteindre le 89ème étage en 37 secondes, auxquels s’ajoutent six étages supplémentaires en sous-sol. La tour est conçue pour résister aux risques sismiques les plus élevés. Plus de 10.000 personnes s’y pressent chaque jour pour travailler et pour accueillir les milliers de visiteurs qui y font la queue à longueur de journée et de nuit.

3. Les rencontres avec les autorités universitaires et diplomatiques

A partir du 9 août, la délégation eut le loisir d’entamer toute une série de rencontres, d’abord au Conseil pour la Planification et le Développement Economique (Yuan Exécutif), ensuite au Bureau de Coopération Internationale pour la Culture et l’Education du ministère de l’Education Nationale, et au Centre de formation diplomatique de Taiwan.

La délégation a eu des entretiens extrêmement précieux avec M. Si-Chen Lee, recteur de l’Université Nationale de Taiwan, avant de visiter le campus de ladite université, la faculté de bio ressources et d’agriculture et l’institut de science et de technologie alimentaires. La visite a l’université nationale de Taiwan a donné lieu à des retrouvailles haïtiano-haïtiennes. La plupart des boursiers haïtiens qui y étudient sont venus se joindre à la délégation dans une ambiance festive et conviviale.

Puis, ce fut la visite du Centre National de recherche en génie parasismique où la délégation a obtenu des explications pointues sur les normes strictes de construction à Taiwan qui, comme on le sait, est souventes fois affecté par des séismes d’amplitude majeure, le dernier en importance remonte à 1999.

A Kaohsiung, ville du Sud située à 1h 30min par TGV, la délégation fut accueillie à l’université nationale de science et de technologie de Pingtung et à la station d’amélioration et de recherche agricole de Kaohsiung du ministère de l’Agriculture.

Enfin à Taipei, la délégation fut invitée à visiter le centre des opérations d’aiguillage du métro de Taipei, une merveille technologique et de modernité.

Il est utile d’indiquer que la délégation fut reçue par le Chargé d’Affaires d’Haïti à Taïwan, Monsieur Mario Chouloute, dans les locaux de l’Ambassade d’Haïti, un bureau spacieux et fonctionnel où tout rappelle la mère. patrie.

Pour sa part, Monsieur Abel Lin, directeur du département des affaires latino-américaines et caraibéennes du ministère des Affaires Etrangères, a convié la délégation à un déjeuner auxquels furent invités trois anciens ambassadeurs taïwanais en Haïti : MM. Hsieh Hsin Ping, Yang Chen Ta et Mien-Sheng Hsu.

Pour clore le séjour, l’ambassadeur Yang Chen Ta a invité, en sa résidence, la délégation avant de recevoir celle-ci à déjeuner dans une atmosphère de gaieté et de bonne humeur.

4. Les enseignements du voyage taïwanais

Au terme de ce long et exténuant voyage, néanmoins constamment fécond et fructueux et extrêmement positif en terme de perspectives pour l’université haïtienne, il est permis de tirer les conclusions suivantes :

  1. D’abord, ce qu’il est convenu d’appeler le « miracle économique taïwanais » n’est pas le fruit de l’improvisation et du hasard. Au sortir de la seconde guerre mondiale et des conflits entre la Chine continentale et les nationalistes chinois, Taïwan était encore un pays sous-développé dont les ressources naturelles étaient rares et la population dans la précarité. Grâce à une réforme agraire réussie, au lancement d’une industrie légère de transformation, au foisonnement des petites et moyennes entreprises, à l’exécution de grand travaux d’infrastructures et à la mise en oeuvre d’une politique de développement d’industries lourdes et d’industries à forte teneur technologique, Taïwan a atteint en un demi-siècle un niveau de développement à revenu élevé dont les recettes sont la détermination, la discipline, le travail, l’ordre et la solidarité.
    Bien plus, ce pays accorde une place de choix à l’éducation dans sa stratégie de développement et de progrès. Le budget de l’éducation est de 19% des dépenses publiques et le taux d’alphabétisation est de 98%. Il existe 162 institutions d’enseignement supérieur à Taïwan, dont 147 universités et 15 lycées professionnels. L’effectif des étudiants est de 1.3. million dont 181.000 en programme de master et 33.000 en programme de doctorat, tandis que 37.800 jeunes Taïwanais poursuivent leurs études aux Etats-Unis et dans des Etats de l’Union Européenne.
    Il est ainsi évident que le développement économique et le progrès social sont étroitement liés à l’expansion de l’éducation, à la formation de cadres supérieurs de haut niveau et à l’extension des filières professionnelles et techniques, pourvoyeuses de main-d’oeuvre qualifiée et diversifiée.
  2. Les autorités académiques et universitaires taïwanaises ont manifesté le plus vif intérêt à renforcer leur coopération avec des institutions haïtiennes d’enseignement supérieur. Faut-il rappeler qu’à l’heure actuelle, une soixantaine d’étudiants haïtiens poursuivent leur formation à Taïwan aux niveaux de la licence et du master. Le raffermissement de ces rapports nécessite une claire volonté à exprimer et à manifester par le gouvernement haïtien dans le cadre de la coopération bilatérale, parallèlement à des actions ponctuelles qui peuvent être initiées par l’UEH et par d’autres partenaires intéressés, avec les universités taïwanaises. Dans ce cadre, la délégation souhaiterait vivement que le gouvernement haïtien, eu concertation avec l’UEH et les institutions d’enseignement supérieur privées, oeuvre à la formalisation d’un cadre global de coopération culturelle, académique, universitaire, technique et scientifique avec le gouvernement de Taïwan. Cette formalisation aura le mérite d’institutionnaliser les rapports sur une base conventionnelle en lieu et place des relations factuelles qui, certes, favorisent un certain nombre de jeunes bacheliers, mais qui n’ont pas la vertu d’étendre la coopération à des domaines pointus dont Taïwan se révèle être un acteur mondial notamment dans les technologies de l’information. A ce sujet, l’Etat taïwanais offre une assistance vigoureuse et des opportunités d’investissement permettant la création d’une centaine de pépinières d’entreprises, la plupart gérées par des universités. Haïti a tout intérêt à explorer ces créneaux porteurs en bénéficiant du support d’un partenaire fiable et durable dont le soutien au développement de notre pays ne s’est jamais démenti.
  3. Une filière de coopération susceptible d’être prise en compte par les autorités haïtiennes demeure la formation et l’échange d’expériences entre les instances compétentes d’Haïti et le Centre National de Recherche en génie parasismique de Taïwan. Ce Centre établi en 1990, par le Conseil National des Sciences a développé une expertise remarquable dans la prévention, les réponses d’urgence et le relèvement d’après séisme. Il faut ici rappeler que Taïwan se situe près de la jonction de deux plaques tectoniques et est fréquemment secoué par des séismes. Le tremblement de terre d’une magnitude de 7, 6 de septembre 1999 avait fait environ 2.400 victimes. En réponse à ce drame, les autorités de l’île ont adopté des mesures drastiques et des normes parasismiques strictes pour pallier d’éventuels dégâts et des pertes en vies humaines. Le Centre vise donc à améliorer les conceptions sismiques pour toutes les constructions et à fournir des installations de recherche parallèlement au développement et à l’amélioration de données d’ingénierie sismique en même temps qu’il édicte et veille à l’application des codes de conception antisismique. Le laboratoire du Centre est un véritable concentré des recherches les plus fines et les plus pointues en la matière et se révèle être l’un des plus avancés du monde en génie parasismique.

Les responsables du Centre se sont montrés largement ouverts à toute forme de coopération avec Haïti dans les domaines de la formation, de la recherche et de l’évaluation sismique. Ils se sont déclarés prêts à recevoir des ingénieurs et des techniciens haïtiens dans leur laboratoire en vue d’aider Haïti dans la prévention et la gestion des risques sismiques. Encore une opportunité que les autorités haïtiennes ne devraient pas négliger.

La délégation haïtienne s’est particulièrement félicitée du courage, de l’endurance, du professionnalisme et de la finesse de leurs accompagnateurs durant le séjour, MM. Gregorio Kuo-Rey Tzeng et Sylvain Chao-Yen Fan, deux cadres du ministère taïwanais des Affaires Etrangères.

De même la délégation est reconnaissante à l’ambassadeur de Taïwan en Haïti, S.E.M. Bernard Bang-Zyh Liu, et à son collaborateur à l’ambassade, M Xavier Ming Chieh Chen, pour l’excellente planification du voyage et du séjour de la délégation.

La délégation haïtienne a pris le chemin du retour en Haïti déterminée à sensibiliser les décideurs haïtiens aux immenses possibilités de coopération haïtiano-taïwanaise qu’il convient de défricher et d’ensemencer au bénéfice des deux peuples et en particulier des étudiants haïtiens.

Renan Hédouville Professeur au CEDI / FDSE Membre de la délégation

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